Extrait

Le Destin des Cœurs
perdus :

Édition intégrale

Le Destin des Cœurs Perdus éditions intégrale en broché.
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Le Destin des Cœurs Perdus éditions intégrale en e-book.
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Ilyana constata à quel point une phrase lancée de manière anodine provoquait des réactions si différentes sur les hommes. Paralysé par l’émoi, John rougit ; de son côté, Emmet blêmit. Il crispa les poings afin de garder son calme, qui n’était plus qu’apparent.

Les accents d’une musique retentirent dans la salle au son des tambourins et des galoubets. John en profita pour entraîner Ilyana dans une carole endiablée. Pour le plus grand plaisir de ce dernier, les cheveux roux de la jeune fille virevoltèrent autour de son visage et ses yeux brillèrent d’un éclat comparable à la plus pure des émeraudes. Maraîchers, fermiers, bûcherons…, chacun attendit son tour pour au moins lui parler.

Abigail épiait Emmet du coin de l’œil. Quand allait-il se décider à l’inviter ? À bout de patience, elle prit les devants et lui tendit la main.

— Venez, allons danser.

— La danse est une distraction de sots !

Mortifiée par son ton mordant, elle retomba sur le banc. Il surveillait sa sœur avec une telle hargne qu’elle crut qu’il allait rosser les cavaliers trop entreprenants. Les farandoles permettaient de toucher la taille des filles convoitées et plus d’un homme en profita pour frôler Ilyana. Chaque fois, le visage d’Emmet se décomposait un peu plus.

— Nombre de prétendants vont vous demander le droit de la fréquenter, remarqua Abigail en suivant son regard.

— Ils repartiront bredouilles, elle est bien trop jeune.

— Je pensais qu’elle allait fêter ses seize ans.

— Justement, c’est encore une enfant.

La poitrine et les hanches épanouies d’Ilyana démentaient formellement cette affirmation. Abigail comprenait le souhait d’Emmet de protéger sa sœur, mais il devait accepter qu’elle le quitte un jour ou l’autre pour se marier.

— Vous prenez votre rôle de grand frère trop à cœur.

Son voisin la fixa avec animosité avant de reporter son attention sur Ilyana. Elle continuait à rire et à danser comme s’il n’existait pas. Cette constatation l’irrita et le peina tout à la fois. Il contempla ses cheveux humides. Ils frisottaient autour de son front, la rendant encore plus désirable à ses yeux. Dieu qu’elle est belle, tous les hommes sont fous d’elle ! La vérité le frappa de plein fouet. Moi aussi, je suis fou d’elle ! Lui, le chevalier sans peur qui s’était juré de ne plus jamais aimer était tombé amoureux fou. Ilyana aperçut le changement sur son visage, son air fiévreux. Elle s’immobilisa, tremblante et frissonnante au milieu des autres danseurs. Leurs regards se croisèrent pour figer le bruit et le temps. Celui d’Ilyana s’emplit d’incertitude, celui d’Emmet balaya ses doutes. Elle s’avança vers lui, il se redressa. Soudain, un villageois entraîna la jeune fille dans la foule et il la perdit de vue. Dépité, il se laissa choir sur le banc. Un sourire béat sur les lèvres, John vint s’asseoir à ses côtés.

— Emmet, je ne sais pas par quoi commencer…

Le visage du chevalier s’assombrit encore d’un pouce. Comme s’il craignait de s’envoler ou de recevoir un coup, le fils du bûcheron agrippa ses maigres doigts sur la table. Malgré sa physionomie ingrate, le brave garçon voulait tenter sa chance avec Ilyana. Après tout, ce n’était point sa faute si ses parents avaient distribué à Charles la joliesse, l’esprit et le courage. Il lui restait la hardiesse et il en usa.

— Emmet, j’aimerais que tu m’autorises à fréquenter ta sœur.

— Non !

Étonné par son ton bref et sans appel, John sursauta. Il s’était préparé à affronter une offense de la part d’Ilyana, mais pas de son frère.

— Pourquoi ?

— J’ai promis sa main à un autre.

— Emmet, on s’connaît tous les deux…

— Justement ! Ma réponse est non !

— T’es obligé d’être aussi désagréable ?

— Va me chercher à boire, je meurs de soif !

Déçu du comportement de son ami, John s’exécuta avec mauvaise grâce. Ilyana s’approcha prudemment d’Emmet. Elle se pencha vers lui tout en battant des cils.

— John vous a-t-il fait sa demande ?

— Te moques-tu de moi ? Veux-tu vraiment fréquenter un villageois ?

Abigail fronça les sourcils. Ce grossier personnage inversait les mots comme ces pédants de la noblesse et il désirait un meilleur parti en faveur de sa sœur. Excédée, autant par sa suffisance que par son caractère irascible, elle se hâta de rejoindre Charles.

Ilyana ne put s’empêcher de sourire en constatant que son plan se déroulait à merveille : Emmet ne parvenait plus à contenir sa jalousie.

— Ce garçon doit être bien malheureux par votre faute.

— Ilyana, cherches-tu à m’irriter ?

— Quel homme pourra me fréquenter sans subir vos critiques acerbes ? Oh ! n’est-ce pas la veuve Horton qui vient d’entrer ? Voulez-vous que je lui demande si elle est libre pour assouvir vos besoins ?

Elle se joue de moi ! fulmina Emmet. Il allait lui ordonner de rentrer avec lui lorsqu’un villageois entraîna Ilyana dans la carole. Au même moment, John déposa le pichet de bière sur la table et repartit sans un mot. Au cours de la soirée, il dut supporter une demande en mariage d’un deuxième prétendant, puis d’un troisième. Au quatrième, il claqua le pichet sur la table et l’amoureux éconduit fila sans insister. Il ne pouvait plus tolérer l’attention de ces hommes sur Ilyana, l’éclat de désir dans leurs yeux et leurs mains sur ses hanches. Décidé à quitter cet endroit, il bouscula sur son passage les autres danseurs pour agripper le bras de la damoiselle. Son cavalier s’interposa aussitôt pour braver ce géant. Lorsque le regard d’Emmet s’assombrit, il regretta aussitôt son intrépidité. Ilyana refusait d’entraîner ce paysan dans une bagarre qui tournerait à son désavantage. Son stupide jeu, juste digne d’une jouvencelle sans cervelle, se retournait contre elle. Elle posa la main sur le bras du chevalier en le suppliant de rentrer. Une fois au-dehors, il remonta le sentier qui menait à la maison à grands pas. Faisant fi de sa mine maussade, elle babilla sans discontinuer.

— Comme ces villageois s’expriment de manière charmante et délicate. Certains nobles pourraient en tirer des leçons de courtoisie.

— Ferme ton clapet, tu me fatigues !

— En voici la preuve !

Image créée par IA avec Bing Creator.
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